Shigeru Miyamoto, Koji Kondo ou Yoichi Yamada se sont réunis en 1998 pour montrer au monde entier à quel point la licence The Legend of Zelda pouvait faire des miracles sur les consoles en 3D. Et c'est réussi.
Ocarina of Time est une pièce qui appartient aujourd’hui au panthéon du jeu vidéo. Et, que l’on soit ou non sensible à l’aventure proposée, on ne peut véritablement douter de ce fait, surtout qu’il endosse sans difficulté le statut de pionnier. Pour la première fois, la série née dans les années 80 sur
NES, venait en effet vers les joueurs avec une toute nouvelle expérience: la
3D. Plus qu’une aventure, ce nouvel opus venait poser une grammaire, une structure inédite, qui accompagnerait la saga un bon moment dans le futur, mais pas que… car si
Mario 64 a été l’une des sources d’inspiration pour les
platformers en 3D qui suivirent, il en fut pratiquement de même avec ce Zelda et les jeux d’aventure.
C’est l’histoire d’un garçon
Le succès du jeu, c'est aussi la bande originale magistrale.
Le jeu s’ouvre d’emblée sur un Link dans une posture assez délicate. Allongé sur sa couche, notre héros passe en effet un sale moment, plongé dans un bien mauvais rêve. Mais que se passe-t-il dans la tête de notre héros? C’est ce que l’on ne tardera pas à savoir, en nous offrant une vue même sur ce rêve justement, lequel possède une tonalité pour le moins dramatique: le temps est tempétueux, les orages éclatent et tout le paysage est plongé dans une ombre menaçante. Une citadelle se laisse également apercevoir. Et tandis que la caméra se dirige lentement vers elle, le portail qui la tient close s’ouvre soudainement laissant ainsi apparaître une cavalière guidant une jeune fille. Leur entrée sur la scène de cet Ocarina of Time est pressante et très éphémère. Certes, elles ne font que passer, mais il n’en faut pas plus pour ressentir une tonalité dramatique, voire tragique. Elles fuient quelque chose ou plutôt quelqu’un : un homme à l’allure terrifiante et le «grand méchant» de l'œuvre, Ganondorf.
Link peut chevaucher son fidèle destrier.
Le songe est prophétique. Tout de suite, il attire l’attention sur les protagonistes de l’histoire et sur le but que doit accomplir notre héros, qui est on ne peut plus simple: débarrasser le royaume d’Hyrule du mal et rétablir la paix - deux notions ici symbolisées par, d’un côté, l’antagoniste et, de l’autre, Zelda. Cependant, au-delà de cette simplicité apparente, le jeu de Nintendo réussit à tenir en haleine le joueur tout du long de l’aventure, et ce, notamment grâce au concept du voyage temporel. De cette manière,
Nintendo instille de la variété au titre, en même temps qu’un sentiment que l’on pourrait qualifier, peut-être à tort, de nostalgie.
Son périple peut être vu comme une métaphore sur le temps qui passe
Avec
Ocarina of Time, on joue en effet avec nos émotions. Pour y parvenir, l’on utilise la comparaison, les «souvenirs» pour nous mener là où l’on souhaite nous emmener et ainsi faire naître de la mélancolie. Une mélancolie qui se renforce au fur à mesure de nos voyages et visites au sein de lieux désolés autrefois plein de vie. Ainsi, les décors auront donc un véritable impact, mais un autre élément contribue également à véhiculer cette aura: la composition musicale. C’est simple, elle n’y a pas grand-chose (en fait, rien du tout!) à lui reprocher. Tonalité joyeuse, triste… elle est assurément variée. Et elle ne se cantonne pas qu’à être un vecteur d’émotion. Elle est aussi un véritable compagnon de voyage, rythmant agréablement notre parcours - que ce soit à l’intérieur d’un donjon ou non, en plus d’avoir une utilité leur de nos actions (avec l’ocarina en notre possession justement).
L’initiation d’un héros
Le début de la 3D pour Link et ses amis!
Outre cet aspect poétique, teinté d'élégie, l’aventure proposée par
Nintendo prend également la forme d’un voyage initiatique. En tout cas, c’est l’impression qu’il nous donne. Et quoi de plus normal… notre héros, Link, traverse des épreuves plus ou moins emplies de sens. Les personnages qu’il rencontre ont des choses à raconter, certains enseignements, à lui apprendre. En gros, son périple peut être vu comme une métaphore sur le temps qui passe et les différents passages de la vie qui attendent tout un chacun. Mais, ça c’est avant tout une interprétation somme toute personnelle.
Bref, passons. Outre cette évolution sur un plan disons émotionnel, il y aussi une nette progression à l'intérieur même du
gameplay. Ce qui paraît assez logique, après tout. Sa particularité, c'est qu'elle se manifeste de manière assez subtile. En fait, bien qu'il puisse exister quelques redondances dans la structure, comme le fait de visiter donjon après donjon, résoudre des énigmes, etc., il existe néanmoins des différences. Les ennemis changent, les «casse-têtes» évoluent, se singularisent et surtout notre arsenal se diversifie au fil de notre aventure. De plus, ces objets serviront à franchir chaque spécificité d’un temple tel que le grappin pour atteindre des plateformes inatteignables autrement, les bottes de plombs pour totalement s’immerger et accéder à des lieux sous-marins, etc.
La fameuse visée Z fait sa toute première apparition avec ce jeu.
D’ailleurs, ces nouvelles possibilités introduites par Ocarina of Time sont directement corrélées à ce que pouvait permettre la
N64. La
3D a en effet pu donner un nouvel élan à
la saga, à lui donner plus de profondeur et de variété. Exemple: lorsque l’on passe par les donjons, on a moins l’impression de fouler des sols que l’on avait déjà foulés précédemment. Un sentiment que, malgré sa très bonne qualité,
A Link to Past pouvait parfois faire naître. Ce présent opus présentait donc une profondeur inédite et était porteur d’une liberté qui manquait assurément avec la
2D. C’est avec Ocarina of Time que l’on pouvait nager et galoper pour la première fois ou bien expérimenter le passage du jour à la nuit.
Un nouveau Pokémon de type plante vient d'apparaître.
Le seul petit souci que nous, public de 2023 qui est passé par Breath of The Wild, aurions probablement tendance à rapprocher, c’est le manque évident de quêtes annexes. Le périple est certes déjà très conséquent, mais d’aucuns penseraient sans doute qu’il n’aurait pas été de trop de penser à ajouter davantage de contenu. Quoique, si l’on réfléchit bien, à cette époque, ce n’était probablement pas une ambition des plus impérieuses. Et puis, si on avait suivi cette orientation, n'aurait-on pas couru le risque de se disperser et ainsi ajouter des longueurs? Cependant, on ne dira pas qu’il n’en existe pas, de ces «missions» - qui sont d’ailleurs amplement suffisantes. Généralement, elles consistent à accroître nos ressources. On peut ainsi partir à la recherche de quarts de cœur pour augmenter sa vitalité, tuer un nombre nécessaire de créatures pour accroître la capacité de notre bourse, par exemple, ou encore suivre une série d'instructions pour récupérer une lame plus qu’efficace, mais toutefois bien fragile. Toutes ces améliorations-là auront donc, au final, une principale finalité: nous renforcer lors pour faire face aux affrontements spectaculaires (avec les boss notamment) qui nous attendent, même si avec un peu de pratique, il n’est pas bien difficile d’en venir à bout.
C’est avec Ocarina of Time que l’on peut nager et galoper pour la première fois
Cela étant, difficile de dire quoi que ce soit à son encontre. Peut-être a-t-il des défauts bien visibles tels les soucis de maniabilité et de caméra… seulement l'œil de votre serviteur ne peut tous les remarquer, ou du moins, y voir une quelconque contrainte dans cela. Il est en effet bien ardu de le faire plus qu’objectivement quand l’objet de la critique en question a été tel un pilier pour celui qui vous livre aujourd’hui ces lignes. L’ambiance poétique, les couleurs exotiques, la prestance des personnages et le sans-faute musical suffisent amplement pour transporter notre esprit loin de la triste réalité qui régit notre monde.
- Torché le 15/05/2023 à 10h23 par Algernon.